Le secteur immobilier au Canada est-il au bord du gouffre?
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La Banque Nationale a publié cette semaine une étude spéciale dédiée à l’immobilier. La CORPIQ vous avait partagé à l’occasion de sa dernière édition d’IMMO, la vision de l’un des deux auteurs de cette étude, Matthieu Arseneau, Directeur général et Chef économiste adjoint du Groupe Économie et Stratégie à la Banque Nationale Marchés financiers.
Voici les grandes lignes de son analyse dans ce nouveau contexte inédit de pandémie.
Depuis la récession de 2008-2009, le marché canadien de l’habitation a été perçu par certains comme une vulnérabilité pour le système financier. La forte contraction de l’économie provoquée par la pandémie de Covid-19 et son effet sur le marché du travail suggère que le taux de chômage pourrait rester élevé pendant un certain temps.
Dans ces conditions, ses prévisions anticipent un recul des prix des logements au Canada de 10 %, un tel repli n’a pas été observé au cours des trois dernières récessions. Plusieurs facteurs sont avancés pour l’expliquer : l’emploi, les taux d’intérêt, le tourisme et l’immigration.
L’emploi
Les experts de la Banque Nationale estiment que le taux de chômage devrait rester aux alentours de 9 % en 2021. En effet plus d’un cinquième des emplois sont concentrés dans des secteurs particulièrement touchés par la pandémie : le commerce de détail, l’hébergement et la restauration, les arts et spectacles. A noter cependant pour nuancer que ces travailleurs affichent les taux de propriété parmi les plus faibles, ce qui laisse supposer un impact moins grand sur le marché de l’investissement résidentiel.
Le niveau des taux d’intérêt
Les baisses de taux d’intérêt avaient favorisé la stabilisation du marché immobilier durant les précédentes périodes de récession. Dans la crise actuelle l’impact pourrait être moindre, les taux étant déjà à un niveau très bas, les banques centrales ont une marge de manœuvre très faible.
Le tourisme
Il est évident que ce secteur est particulièrement affecté par la pandémie et affectera négativement le secteur immobilier. Les restrictions ont impacté le secteur de l’hébergement touristique et la location des propriétés qui étaient destinées aux touristes notamment via des plateformes de type Airbnb. Dans ce contexte, les analystes de la Banque Nationale anticipent que de nombreuses propriétés risquent d’être mises sur le marché de la revente puisqu’elles ne génèrent peu ou plus de revenus.
L’immigration
Le dynamisme du marché canadien de ces dernières années avait notamment pour origine la politique d’immigration, et sa prédilection pour les immigrants économiques, qui a apporté un support constant au marché immobilier et a eu une influence sur les prix des logements.
Les analystes avancent que la réduction des seuils de l’immigration dans les trimestres à venir constituerait un facteur de risque à une baisse plus prononcée des prix, au même titre que le relèvement de la mise de fonds minimale suggéré en mai dernier par la SCHL pour les critères d’octroi de crédit.
Enfin, l’amplitude de baisse anticipée par les experts de la Banque Nationale varie d’une ville à l’autre, notamment en fonction de l’abordabilité. Ainsi le recul des prix prévu pour Montréal (7 %) est inférieur à celui des trois autres grandes villes canadiennes : Toronto (-13 %), Vancouver (-12 %) et Calgary (-10 %).