Cannabis médical : la Régie du logement refuse de trancher
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Une entreprise de gestion immobilière membre de la CORPIQ qui tentait de faire respecter à une locataire l’interdiction au bail de fumer du cannabis vient d’essuyer un deuxième refus, cette fois devant le Bureau de révision de la Régie du logement. La locataire a invoqué son droit de fumer en raison d’une condition médicale.
Les trois juges administratifs qui ont entendu la cause en révision et signé conjointement la décision estiment que le jugement initial rendu en mars, celle de la juge Francine Jodoin, était « correcte ». La juge Jodoin avait alors statué que la locataire, qui avouait « s’automédicamenter », remplissait les exigences nécessaires pour prouver qu’elle consomme du cannabis pour raisons médicales, même si son médecin ne lui recommandait pas un tel traitement.
Cette décision décevante revêt une importance particulière, étant donné qu'un flou juridique se perpétue donc entourant l’interprétation du terme « raisons médicales ». En effet, le gouvernement a refusé de préciser la loi et a pelleté le débat vers le tribunal. De son côté, la Régie du logement rend des décisions différentes, selon si le juge est tenant du courant jurisprudentiel exigeant une preuve médicale documentée par un professionnel ou s’il appartient plutôt au courant qui se contente d’un témoignage du locataire.
Les trois juges concluent donc qu’en matière d’usage de cannabis à des fins médicales, la preuve doit être analysée au cas par cas :
« Il est faux de prétendre qu’une importante controverse jurisprudentielle existe au sein du tribunal de la Régie du logement ». « Il est vrai que (…) certaines décisions ramenèrent la notion de raisons médicales à l’obligation de produire en preuve des documents médicaux spécifiques, et ce, contrairement à d’autres qui ne l’exigent pas. (…) Les litiges ont notamment été tranchés en tenant compte des circonstances propres à chacun », peut-on y lire.
Manque de courage
« Après le gouvernement, c’est au tour du tribunal de manquer de courage », a déclaré le directeur des affaires publiques de la CORPIQ, Hans Brouillette. « En refusant de se prononcer sur la nature de la preuve qui devrait être admissible pour qu’un locataire puisse fumer de la drogue malgré une interdiction au bail, ces trois jugent évitent de se mettre à dos leurs confrères, tenants de l’un ou de l’autre des deux courants jurisprudentiels qui se sont formés depuis un an. Le problème reste entier et va prendre de l’ampleur, car des milliers de baux existants et à venir contenant une clause interdisant de fumer pourraient se retrouver inapplicables si le locataire invoque des motifs médicaux. »
La CORPIQ déplore le fait que les propriétaires devront, pour protéger leurs locataires non-fumeurs qui se plaignent de leur voisin, judiciariser chaque cas et espérer tomber sur le bon juge affecté à l’audience. Sans quoi ils auront à démontrer que l’usage de cannabis cause des troubles de voisinage et faire venir témoigner les locataires victimes de la fumée secondaire émanant de leur voisin.