Le discours des comités logements nuit au Québec
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Dans sa lettre d’opinion publiée récemment dans certains médias, le Regroupement des comités logements et associations de locataires du Québec (RCLALQ) tire sur plusieurs cibles pour dénoncer ce que cet organisme considère comme des injustices envers les locataires du Québec. Or, certaines affirmations le placent devant d’évidentes contradictions, surtout lorsqu’on analyse les chiffres avec rigueur.
Le RCLALQ prétend que les loyers augmentent plus vite que l’inflation. De quelle inflation parle-t-il au juste? De l’inflation en général, celle ralentie depuis des années par la baisse du prix de l’essence? Il serait plus logique de comparer l’évolution des loyers avec l’inflation des composantes qui contraignent l’immobilier : les taxes municipales en explosion, les primes d’assurance galopantes, les dépenses de gestion, ainsi que le coût horaire de main-d’œuvre de la construction, en nette progression.
Le loyer moyen d’un logement 4 ½ observé par la SCHL a progressé annuellement de 1,5 % à 2,0 % selon les principales villes du Québec sur une période de 25 ans. Cela inclut les bâtiments neufs, donc plus chers.
Et si on parlait de l’inflation des revenus? En 1996, le revenu moyen après impôt des ménages locataires était de 21 400 $, contre 35 800 $ en 2015 (dernière année publiée par Statistique Canada). C’est une progression moyenne annuelle de 2,7 %.
Les loyers sont désormais les plus bas parmi les dix provinces canadiennes, alors que le Québec était au 8e rang il y a quelques années. En 2017, un 4 ½ s’y louait 751 $, soit 36 % moins que la moyenne des neuf autres provinces. C’est ce que le RCLALQ appelle « la cherté des loyers »? De plus, 51 % des locataires québécois font le choix de vivre seuls, révèle le Recensement 2016, contre 41 % dans le reste du pays. En ont-ils tous les moyens?
Dans un de ses communiqués, le RCLALQ dit que les loyers ont augmenté de 46 % entre 2001 et 2016. C’est 2,6 % par année. Selon une source un peu plus officielle, Statistique Canada, les loyers ont plutôt évolué en moyenne de 1,2 % par année durant cette période. Il est important de savoir que lorsqu’un propriétaire se présente devant la Régie du logement pour une fixation de loyer, le tribunal lui accorde une indexation pour la partie du loyer qui représente le revenu net et les frais de gestion de l’immeuble. Selon le règlement, cette indexation correspond au taux d’augmentation général des loyers au Québec. Le choix d’un indicateur fiable des loyers est très important, car il détermine le résultat du calcul. Puisque le taux d’augmentation évoqué par le RCLALQ serait plus généreux que celui utilisé présentement lors d’une fixation de loyer, accepterait-il l’invitation de la CORPIQ d’aller conjointement demander à la Régie du logement de prendre désormais ses chiffres?
Comment un si petit regroupement d’activistes comme le RCLALQ parvient-il à nuire au Québec? Tant sur la question des loyers que sur celle des délais judiciaires à la Régie du logement, le discours du RCLALQ entretient et même exagère les dissensions entre propriétaires et locataires. Or, il fournit ainsi au gouvernement du Québec le meilleur des prétextes pour ne pas agir afin de maintenir un soi-disant « équilibre ». Conséquence : aucune réforme du tribunal de la Régie du logement n’a eu lieu, aucune mesure pour préserver le patrimoine bâti locatif n’est envisagée. Les locataires, les propriétaires et le Québec sont tous perdants. Le seul gain est politique.
Hans Brouillette
Directeur des affaires publiques
CORPIQ