En acceptant un loyer, vous renoncez à la libre disposition des biens
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Nous vous présentons un cas où une propriétaire réclame des dommages moraux (5 000 $) et punitifs (5 000 $) à la suite d’un incendie qui s’était déclaré le 27 mars dans l’un de ses logements par une occupante non approuvée en situation de sous-location.
Fait inusité, la propriétaire revendique qu’elle n’a pas eu droit « à la jouissance paisible et à la libre disposition de ses biens, sauf dans la mesure prévue par la loi », comme stipulé dans l’article 6 de la Charte québécoise. Or, le Tribunal a jugé que la propriétaire ne peut revendiquer ce droit puisqu’elle continuait d’accepter le loyer pendant la période des faits litigieux. En acceptant le loyer, elle a démontré qu’elle acceptait de poursuivre le bail. De ce fait, la propriétaire ne peut donc par la suite revendiquer la libre disposition et jouissance des biens pendant la période des faits litigieux.
Le locataire avait exprimé son intention de quitter le logement en février et de céder son bail pour le 1er mars, mais aucun candidat n’a été trouvé pour remplir cette condition. Une candidate a été proposée par le locataire, mais son comportement fuyant et le manque d’information sur sa capacité financière et ses coordonnées actuelles faisaient en sorte que la propriétaire avait désapprouvé sa candidature.
C’est quand même cette candidate non-approuvée qui a finalement occupé le logement et s’est mise en état de sous-location, malgré le refus de la propriétaire. Pendant ce temps, c’est le locataire qui résidait jusqu’en février qui a continué à verser le loyer à la propriétaire jusqu’en juin tout en laissant la nouvelle occupante vivre dans son logement.
Le préjudice se cristallise avec l’incendie causé par l’occupante à la fin du mois de mars. L’évènement qui a mené « aux tracas, inconvénients et stress normalement attachés à cette situation que nul ne peut prévoir ni souhaiter ». Et cet incendie a été causé par un occupant qui a eu accès au logement « par les grâces du locataire ».
Selon l’article 1862 C.c.Q. :
« 1862. Le locataire est tenu de réparer le préjudice subi par le locateur en raison des pertes survenues au bien loué, à moins qu’il ne prouve que ces pertes ne sont pas dues à sa faute ou à celle des personnes à qui il permet l’usage du bien ou l’accès à celui-ci.
Néanmoins, lorsque le bien loué est un immeuble, le locataire n’est tenu des dommages-intérêts résultant d’un incendie que s’il est prouvé que celui-ci est dû à sa faute ou à celle des personnes à qui il a permis l’accès à l’immeuble. »
L’occupante ne peut donc être considérée comme responsable de l’incendie puisqu’elle n’avait jamais eu l’autorisation de la propriétaire d’occuper le logement. C’est plutôt le locataire qui a la responsabilité de la faute causée par autrui, ici, l’occupante, à qui il a permis d’avoir accès à son logement. Le Tribunal a décidé que le fondement des dommages ne réside pas dans la mauvaise foi du locataire. Même s’il a laissé une autre personne occuper son logement, la propriétaire a tout de même accepté les loyers.
Le Tribunal retient que les dommages moraux ont quand même été significatifs, résultants du stress à gérer les documents des deux assureurs et effectuer les travaux à la suite des dommages causés par l’incendie dans un divan. La propriétaire recevra plutôt 3 500 $ pour dommages et intérêts moraux, plus l’indemnité de l’article 1619 C.c.Q. et les frais judiciaires de 76 $.